Un premier comité de pilotage s’est tenu ce jour au ministère des Solidarités et de la Santé en présence de toutes les parties prenantes pour faire le point sur les mesures en cours, dont celles concernant la réduction du risque pour les patientes, la prise en charge thérapeutique des femmes et des enfants, les études épidémiologiques et le dispositif de réparation de l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux (ONIAM).
L’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) et la Caisse nationale de l’Assurance Maladie (Cnam) ont présenté aujourd’hui les résultats de l’étude sur le risque de troubles neuro-développementaux précoces chez des enfants (avant l’âge de 6 ans) exposés in utero à l’acide valproïque ou aux autres antiépileptiques en monothérapie en France, comparativement aux enfants non exposés.
Cette étude française issue des données du SNDS[1] apporte des éléments nouveaux par rapport aux données de la littérature scientifique sur la caractérisation du risque lié à l’acide valproïque selon la dose et la période d’exposition pendant la grossesse.
Cette étude témoigne de la volonté des autorités françaises de mieux mesurer l’impact de l’exposition in utero à l’acide valproïque et aux autres anti-épileptiques pour mieux prendre en charge les patientes.
L’étude a porté sur plus d’1,7 million d’enfants nés entre le 1er janvier 2011[2] et le 31 décembre 2014, sans diagnostic de malformation cérébrale à la naissance et dont la mère était affiliée au régime général de l’Assurance Maladie. Les enfants ont été suivis jusqu’à l’âge de 3,6 ans en moyenne (5 ans au maximum). Pour estimer le risque de troubles neuro-développementaux précoces, plusieurs indicateurs[3] ont été comparés entre les enfants exposés in utero à un traitement antiépileptique en monothérapie et les enfants non exposés.
Risque associé à l’exposition in utero à l’acide valproïque
Cette étude confirme le risque de troubles neuro-développementaux précoces en lien avec l’exposition à l’acide valproïque pendant la grossesse. Ce risque apparaît de l’ordre de 4 à 5 fois plus élevé parmi les enfants exposés par rapport aux enfants dont la mère n’a pas reçu d’antiépileptique pendant la grossesse, avec un effet dose marqué. En effet, ce risque apparaît jusqu’à 8 à 10 fois plus élevé parmi les enfants exposés aux doses les plus fortes.
Elle apporte également des informations nouvelles suggérant que la période d’exposition à risque de troubles neuro-développementaux précoces liés à la prise d’acide valproïque pourrait se situer plus particulièrement au cours du deuxième et/ou du troisième trimestre de la grossesse. Toutefois, une augmentation du risque associée à une exposition limitée au premier trimestre de grossesse ne peut être exclue. L’ANSM et la Cnam rappellent que l’exposition au valproate au cours du premier trimestre de grossesse est associée à un risque augmenté de malformations congénitales majeures.
Risque associé à l’exposition in utero à d’autres traitements antiépileptiques
Pour les autres médicaments de l’épilepsie, le risque de troubles neuro-développementaux précoces apparaît beaucoup moins marqué que pour l’acide valproïque, avec des différences en fonction des substances.
Le risque de diagnostic de troubles mentaux et du comportement parmi les enfants exposés in utero à la lamotrigine (principale alternative à l’acide valproïque) est de l’ordre de 3 fois moins élevé comparé aux enfants exposés à l’acide valproïque. Si l’étude montre une association entre l’exposition in utero à la lamotrigine et le risque de troubles neuro-développementaux précoces, celle-ci pourrait être expliquée non pas par l’exposition à la lamotrigine mais plutôt par un effet de la maladie psychiatrique maternelle et/ou des caractéristiques qui lui sont associées. En effet, l’association ne persiste pas lorsque l’analyse est restreinte aux enfants nés de mère sans maladie psychiatrique identifiée.
L’étude suggère que l’exposition in utero à la prégabaline pourrait être associée à un risque de diagnostic de troubles mentaux et du comportement augmenté de 1,5 fois par rapport aux enfants non exposés. Ce risque nécessite d’être surveillé et confirmé par d’autres études.
Les résultats ne fournissent pas d’argument en faveur d’un effet sur le développement neurocognitif précoce de l’exposition in utero aux autres antiépileptiques (carbamazépine, phénobarbital, lévétiracétam, oxcarbazépine, topiramate, clonazepam, gabapentine), sans toutefois qu’une augmentation de risque puisse être exclue de façon certaine.
Des mesures de réduction du risque engagées en France depuis 2014 par les autorités sanitaires
La Direction générale de la santé (DGS), l’ANSM et la Cnam rappellent que cette étude s’inscrit dans le plan d’actions global conduit depuis 2014 en France par les autorités de santé sur les risques liés aux médicaments à base d’acide valproïque et aux autres antiépileptiques lors d’une exposition au cours de la grossesse. Le suivi à partir des données du SNDS des enfants exposés à ces médicaments sera poursuivi au moins jusqu’à ce que les enfants aient atteint la fin de l’école primaire.
Plusieurs mesures de réduction du risque pour limiter l’exposition au valproate pendant la grossesse ont été mises en place depuis 2015 par les autorités de santé en lien avec l’association de patients APESAC et les professionnels de santé. Un renforcement des conditions de prescription et de délivrance a été effectué à l’issue de la première réévaluation du valproate au niveau européen : prescription annuelle obligatoirement par un spécialiste, mise en place d’un formulaire d’accord de soin et élaboration de documents de réduction du risque (brochure patiente et guide pour les prescripteurs). La France a complété ces mesures par l’apposition sur les boites d’un pictogramme et d’une mise en garde et la mise à disposition d’une carte patiente. En 2017, l’ANSM a décidé de contre-indiquer le valproate dans le traitement des épisodes maniaques des troubles bipolaires et a déclenché un nouvel arbitrage européen qui a entériné les mesures de réduction du risque déjà instaurées en France et les a élargies à toute l’Europe. Le valproate est interdit pendant la grossesse et ne doit plus être prescrit aux filles, adolescentes et femmes en âge de procréer (sauf circonstances exceptionnelles dans l’épilepsie).
Depuis la mise en place du plan d’action, on constate une diminution de 45 % du nombre de femmes en âge de procréer sous valproate et de 66 % du nombre d’enfants nés de grossesses exposées au valproate (source SNDS).
En complément, la Haute Autorité de santé (HAS) travaille en collaboration avec l’ANSM et l’APESAC pour actualiser les recommandations thérapeutiques sur les alternatives au valproate chez les filles, adolescentes, femmes en âge de procréer et femmes enceintes.
La Ministre a demandé à ses services et à la Caisse nationale de l’Assurance Maladie de travailler à la mise en place d’un dispositif de suivi de la prise en charge des enfants exposés in utero, afin que soit organisée une filière de soins permettant de simplifier leur parcours et d’assurer des soins adaptés à chacune des situations.
Elle rappelle aux femmes traitées par antiépileptiques, notamment celles en âge de procréer ou en désir de grossesse, l’importance pour leur santé d’un échange avec leur médecin avant
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[1] – Système National des Données de Santé, anciennement Système National d’Information Inter-Régimes de l’Assurance Maladie (SNIIRAM)
[2] – Les informations nécessaires pour étudier les risques d’une exposition médicamenteuse in utero ne sont disponibles que pour les enfants nés depuis 2011.
[3] – Diagnostics de troubles mentaux et du comportement effectués lors d’une hospitalisation ou pour une prise en charge d’affection de longue durée, recours à un orthophoniste, un orthoptiste ou un psychiatre.