Dans le contexte actuel de la diffusion rapide du variant delta, la Haute Autorité de Santé (HAS) a considéré, dans un avis publié le 9 juillet 2021, que les vaccins à ARN messager permettent de lutter plus efficacement contre la transmission du virus. Les personnes devant bénéficier d’un schéma de vaccination à deux doses et ayant déjà reçu une première injection de Vaxzevria® (AstraZeneca®) devront recevoir une deuxième dose avec un vaccin à ARNm, à partir de 4 semaines après cette première injection.
Covid-19 : Adapter la stratégie de vaccination pour faire face au variant delta
Malgré la baisse des décès et des hospitalisations liés à la Covid-19 depuis plusieurs semaines, l’émergence du variant delta, fait craindre une dégradation de la situation sanitaire dans les prochaines semaines. Un rebond significatif du nombre de cas détectés a d’ailleurs déjà été observé. Cela confirme la nécessité de réexaminer l’efficacité des différents schémas vaccinaux sur ce variant en ce qui concerne la survenue de formes symptomatiques, sévères, ou asymptomatiques (donc l’effet sur la transmission). Pour limiter l’intensité de la nouvelle vague due à la circulation de ce variant, une seule solution : vacciner le plus et le plus vite possible.
Après une période marquée par la décélération de l’épidémie, le nombre de contaminations repart rapidement à la hausse, notamment du fait de l’émergence de nouveaux variants plus contagieux et, en particulier, du variant delta. Si le nombre de nouveaux cas et la tension hospitalière demeurent encore faibles, la dynamique observée en France est significative et pourrait rapidement dégrader à nouveau la situation sanitaire. Ainsi, le variant delta a-t-il été détecté dans environ 43% des PCR de criblage le recherchant et pour lesquelles le résultat était interprétable au cours de la semaine du 28 juin au 04 juillet, contre 21% la semaine précédente[1]. Par ailleurs, une modélisation de l’Institut Pasteur[2] estime qu’avec la circulation d’un variant à transmissibilité accrue et la couverture vaccinale envisagée au 1er septembre 2021, une tension importante sur le système de santé français est à craindre entre la rentrée et le printemps prochain si les mesures barrières ne sont plus respectées et en l’absence d’autres mesures d’atténuation en place.
En réponse à une saisine de la Direction générale de la santé, la HAS actualise ses recommandations concernant la stratégie vaccinale à adopter face à l’expansion rapide de ce variant en France, et précise notamment sa position à l’égard des vaccins et des schémas vaccinaux à privilégier pour protéger au mieux la population.
Des vaccins efficaces contre le variant delta pour prévenir les formes graves de Covid-19
L’efficacité des vaccins à ARNm et du vaccin Vaxzevria® (AstraZeneca) sur la prévention des formes graves de Covid-19 est établie, y compris vis-à-vis du variant delta. Les données recueillies en vie réelle au Royaume-Uni concernant le variant delta du SARS-CoV-2 montrent que l’efficacité vaccinale sur les formes graves est maintenue à un niveau élevé après un schéma de vaccination complet avec le vaccin Comirnaty® (Pfizer/BioNTech) ou le vaccin Vaxzevria® (AstraZeneca) en comparaison avec le variant alpha. L’efficacité observée sur les hospitalisations associées au variant delta est excellente, à plus de 90% après une vaccination complète pour chacun des deux vaccins[3]. L’efficacité sur les formes peu symptomatiques et sur la transmission semble en revanche meilleure avec les vaccins à ARNm.
Quant au vaccin Janssen, si les données actuellement disponibles sont très encourageantes, elles sont à ce stade insuffisantes pour conclure formellement à la conservation de l’efficacité du vaccin sur le variant delta.
Comment accélérer encore la vaccination pour contrer ce nouveau variant ?
La vaccination doit se poursuivre à un rythme élevé et s’intensifier afin d’assurer rapidement une couverture vaccinale optimale de la population, compatible avec la poursuite de la levée des restrictions et nécessaire pour garantir la protection des plus vulnérables.
Comme le montrent les récents travaux de modélisation menés par l’Institut Pasteur[4], les personnes non-vaccinées contribuent à la transmission de façon disproportionnée : une personne non-vaccinée a 12 fois plus de risque de transmettre le SARS-CoV-2 qu’une personne vaccinée. En complément, la HAS rappelle qu’un schéma vaccinal complet est nécessaire pour garantir une efficacité optimale de la vaccination.
Par ailleurs, afin de prévenir plus efficacement la survenue de formes sévères de Covid-19 et de limiter la transmission du virus, la HAS recommande de privilégier l’utilisation des vaccins à ARNm (Pfizer ou Moderna) qui disposent du meilleur niveau d’efficacité pour la prévention non seulement des formes graves et symptomatiques mais également contre la transmission. Pour vacciner de manière complète plus rapidement, la HAS préconise de réduire l’intervalle entre les deux doses de vaccin au délai minimal recommandé.
Ainsi, elle recommande :
- De privilégier l’utilisation de vaccins à ARNm pour les personnes qui démarrent la vaccination avec un intervalle de 3 à 4 semaines entre les deux doses ;
- De privilégier pour la deuxième dose l’utilisation d’un vaccin à ARNm pour les personnes de plus de 55 ans qui ont reçu une première dose de vaccin Vaxzevria® et de proposer cette deuxième dose à partir de 4 semaines après la première. Les études récentes ont confirmé la très bonne qualité de la réponse offerte par un schéma hétérologue Vaxzevria®/ARNm tout en apportant des éléments rassurants sur le plan de la tolérance.
La HAS estime toutefois que la poursuite du schéma vaccinal avec le vaccin Vaxzevria® est envisageable chez les personnes âgées de plus de 55 ans qui le souhaitent compte tenu des résultats d’efficacité en vie réelle obtenus après deux doses de ce vaccin sur la prévention des formes sévères de Covid-19. Elle recommande que cela fasse l’objet d’une décision médicale partagée et que les personnes bénéficient d’une information claire sur les différentes options possibles.
L’utilisation du vaccin Janssen selon une stratégie hétérologue, avec un vaccin à ARNm n’ayant pas été étudiée, et la nécessité d’une seconde dose de ce vaccin faisant actuellement l’objet de l’étude clinique ENSEMBLE-2, la HAS ne peut se prononcer pour le moment sur la pertinence de recourir à ces schémas vaccinaux avec le vaccin Janssen.
La lutte contre la transmission du virus impose la réflexion sur l’obligation vaccinale
De plus, à la lumière des données disponibles sur la protection des vaccins contre la transmission, la HAS considère que la couverture vaccinale des professionnels de santé et plus largement de ceux qui sont en contact avec des personnes vulnérables revêt un enjeu éthique autant que de santé publique.
C’est pourquoi, au-delà des mesures incitatives, des opérations de communication, d’information et de la recherche de l’adhésion de chacun, la HAS recommande que soit envisagée sans délai l’obligation vaccinale de l’ensemble des professionnels en contact avec des personnes vulnérables. Au-delà, au vu de la progression actuelle de l’épidémie, il est nécessaire d’entamer dès à présent la réflexion sur une extension plus importante de cette obligation vaccinale en population générale afin de pouvoir prendre à temps cette décision si elle s’imposait.
[1] Santé publique France 2021
[2] Bosetti P, Tran Kiem C, Andronico A, Colizza V, Yazdanpanah Y, Fontanet A, et al. Epidemiology and control of SARS-CoV-2 epidemics in partially vaccinated populations: a modeling study applied to France, 2021. https://hal-pasteur.archives-ouvertes.fr/pasteur-03272638/document
[3] Stowe 2021
[4] https://modelisation-covid19.pasteur.fr/evaluate-control-measures/impact-partially-vaccinated-population/