Dans le cadre du dispositif renforcé de surveillance des vaccins contre le Covid-19, EPI-PHARE (groupement d’intérêt scientifique en épidémiologie des produits de santé ANSM-Cnam) a réalisé une nouvelle étude de pharmaco-épidémiologie pour mesurer le risque de saignements menstruels abondants ayant fait l’objet d’une prise en charge à l’hôpital après une vaccination par les vaccins contre le Covid-19 en France. Cette étude a été réalisée à partir des données du Système national des données de santé (SNDS) couplé au Système d’information vaccin Covid (VAC-SI). Elle met en évidence une augmentation de 20 % du risque de saignements menstruels abondants ayant nécessité une prise en charge à l’hôpital dans un délai de 1 à 3 mois suivant la primovaccination par vaccin à ARNm (Comirnaty ou Spikevax). En revanche, le risque n’apparaît pas augmenté au-delà de 3 mois après la primo-vaccination, ni après l’administration d’une dose de rappel. Pour rappel, ces troubles menstruels ont été ajoutés dans les résumés des caractéristiques du produit (RCP) et les notices des vaccins à ARNm en octobre 2022.
Dans le cadre du dispositif de surveillance renforcée des vaccins contre le Covid-19, des cas de troubles menstruels, comme un retard de règles, l’absence de règles et des saignements menstruels anormalement abondants, ont été déclarés notamment sur le portail de signalements des effets indésirables. Le comité de suivi de l’ANSM avec le réseau des CRPV a conclu en juillet 2021 qu’il s’agissait d’un signal potentiel pour les vaccins à ARNm. Cette information a été partagée à l’Agence européenne des médicaments (EMA). L’ANSM a également organisé en juin 2022 une réunion avec des représentants d’associations de patients et de professionnels de santé qui a permis de renforcer l’information des femmes et de rappeler l’importance de la déclaration.
Au niveau européen, les saignements menstruels abondants ont été considérés comme un effet indésirable des vaccins à ARNm Comirnaty et Spikevax par l’EMA en octobre 2022 suite à l’évaluation des données de pharmacovigilance, notamment celles partagées par l’ANSM. Ces troubles ont ensuite été ajoutés dans les résumés des caractéristiques du produit (RCP) et les notices de ces deux vaccins.
C’est dans ce contexte qu’EPI-PHARE a réalisé une étude cas-témoins à partir des données du Système national des données de santé (SNDS) couplé au Système d’information vaccin Covid (VAC-SI) pour mesurer le risque de saignements menstruels abondants après une vaccination contre le Covid-19 à l’échelle de l’ensemble de la population en France. L’étude a porté exclusivement sur les cas de saignements menstruels abondants ayant fait l’objet d’une prise en charge hospitalière : seuls ceux-ci sont identifiables à partir des informations disponibles dans le SNDS.
L’étude a inclus les 4 610 femmes âgées de 15 à 50 ans non enceintes ou post-parturientes, sans antécédents d’hystérectomie ou de troubles de la coagulation, prises en charge à l’hôpital pour saignements menstruels abondants entre le 12 mai 2021 et le 31 août 2022 en France. Plus de 70 % d’entre elles ont été prises en charge en hôpital de jour. Ces cas ont été appariés à 89 375 femmes témoins avec les mêmes caractéristiques d’âge, de lieu de résidence et d’utilisation de la contraception.
Au moment de l’étude, 71 % des cas et 70 % des témoins avaient reçu au moins une dose de vaccin contre le Covid-19, et parmi ces personnes vaccinées, la dernière dose reçue était une dose de primovaccination (première ou deuxième dose) pour 68 % et 66 %. Le dernier vaccin reçu était un vaccin à ARNm (Comirnaty ou Spikevax) pour 99,8 %.
En comparaison avec les femmes non vaccinées, le risque de saignements menstruels abondants nécessitant une prise en charge à l’hôpital était augmenté de 20 % pour les femmes dont la dernière dose reçue était une dose de primovaccination administrée dans les 1 à 3 mois précédents. En revanche, ce risque n’était pas augmenté pour les femmes dont la dernière dose reçue était une dose de primovaccination datant de plus de 3 mois ou une dose de rappel.
En faisant l’hypothèse d’une relation causale, le nombre estimé de cas de saignements menstruels abondants ayant nécessité une prise en charge à l’hôpital attribuables à la primovaccination entre le 12 mai 2021 et le 31 août 2022 en France était de 103, soit un taux de 8 cas pour 1 000 000 femmes vaccinées à l’échelle de l’ensemble des 13 millions de femmes de 15 à 50 ans vaccinées au 31 août 2022.
Ces résultats fournissent de nouveaux arguments en faveur de l’existence d’un risque augmenté de saignements menstruels abondants dans les 3 mois suivant la primovaccination contre le Covid-19 par vaccin à ARNm. En revanche, les résultats ne suggèrent pas d’augmentation du risque de saignements menstruels abondants après une dose de rappel.
Rapport EPI-PHARE Risque de saignements menstruels abondants ayant nécessité une
prise en charge à l’hôpital au décours de la vaccination contre le
COVID-19 : étude cas-témoins à partir du système national des
données de santé (SNDS)