Nous tenons à vous informer de la déclaration de 2 nouveaux cas de syndrome de perfusion du propofol, tous les deux d’issue fatale, survenus à 1 mois d’intervalle dans un service de réanimation à notre réseau.
Le syndrome de perfusion du propofol est un effet rare et connu lors de son utilisation pour la sédation en Unités de Soins intensifs. Cependant, la survenue rapprochée de ces deux cas d’issue fatale, conduit l’ANSM, en lien avec la Société française d’anesthésie et de réanimation (SFAR), la Société de Réanimation de Langue Française (SRLF) et le Groupe Francophone de Réanimation et Urgences Pédiatriques (GFRUP) à sensibiliser les anesthésistes-réanimateurs et médecins intensivistes-réanimateurs sur ce syndrome, ses facteurs de risques et sa prise en charge.
Définition et facteurs de risque
Le propofol est un agent anesthésique intraveineux, d’action rapide, utilisable pour l’induction et l’entretien de l’anesthésie générale ainsi que pour la sédation en Unité de Soins intensifs et pour la sédation anesthésique des actes de courte durée et en complément d’anesthésie locorégionale.
Chez certains patients, l’utilisation du propofol pour la sédation en Unités de Soins intensifs peut être associée à un ensemble de troubles métaboliques et de défaillances organiques, caractéristiques du syndrome de perfusion du propofol et pouvant entraîner le décès.
Le syndrome de perfusion du propofol peut se manifester par les évènements suivants : acidose métabolique, rhabdomyolyse, hyperkaliémie, hépatomégalie, insuffisance rénale, hyperlipidémie, arythmie cardiaque, syndrome de Brugada (ECG de type sus-décalage du segment ST avec aspect en dôme), insuffisance cardiaque d’évolution rapide ne répondant généralement pas à un traitement par un agent inotrope. Dans la littérature, des lésions encéphaliques sévères (noyaux gris centraux) ont également été rapportées de manière concomitante au syndrome métabolique chez une patiente après seulement 3 heures d’un acte chirurgical sous anesthésie intraveineuse au propofol.
Plusieurs facteurs de risque ont été à ce jour identifiés : jeune âge (le propofol est contre indiqué chez les patients de moins de 16 ans pour la sédation continue en Unité de Soins Intensifs), diminution des apports en hydrates de carbone (jeûne périopératoire), co-administration de metformine, diminution de l’apport tissulaire en oxygène, lésion neurologique grave et/ou sepsis, fortes doses d’un ou de plusieurs des agents pharmacologiques suivants – vasoconstricteurs, stéroïdes, agents inotropes ou utilisation de propofol à des doses supérieures à 4 mg/kg/h durant plus de 48 h. Parfois, le syndrome de perfusion du propofol peut être révélateur d’une maladie mitochondriale.
Les deux cas récents signalés à l’ANSM présentaient plusieurs facteurs de risque de survenue de ce syndrome : patientes neurolésées, administration prolongée de propofol (>48h) et à une posologie >4 mg/kg/h, injection de fortes doses de noradrénaline, patiente âgée de moins de 16 ans pour l’un des cas.
Diagnostic, surveillance et mesures à prendre
Le diagnostic du syndrome de perfusion du propofol peut être parfois difficile à évoquer, d’autant plus que les données de la littérature montrent que ce syndrome peut également être observé lors d’un usage de propofol sur une courte durée y compris lors d’anesthésies de quelques heures. Les manifestations cliniques de ce syndrome sont parfois non spécifiques. De ce fait, devant une dégradation hémodynamique ou l’apparition d’une acidose métabolique (lactique) non expliquées par la situation clinique chez un patient traité par propofol il est important d’évoquer un syndrome de perfusion du propofol.
Face à la suspicion d’un syndrome de perfusion du propofol, il est nécessaire d’arrêter le propofol dès que possible et utiliser un autre traitement sédatif.
Dans la majorité des cas, lorsque le syndrome de perfusion du propofol est identifié précocement et que le propofol est immédiatement arrêté, l’évolution est favorable.
D’autre part, des mesures de surveillance peuvent être mises en place, notamment en cas de perfusion prolongée ou à forte posologie, pour détecter la survenue de ce syndrome telles que monitoring ECG, réalisation de gaz du sang artériels avec dosage des lactates, dosage des CPK et dosage des triglycérides.